Réglé comme du papier à musique, le studio NetherRealm nous propose depuis sa création un nouveau jeu de combat tous les deux ans en alternant entre les franchises Mortal Kombat et Injustice. Un rythme effréné qui pourrait faire craindre que la recette mise au point en 2011 et continuellement améliorée depuis ne devienne écœurante, mais ce serait sans compter sur le talent d’Ed Boon et ses équipes qui parviennent avec Mortal Kombat 11 à nous offrir la quintessence de la mythique licence. Fight !

Colonnes vertébrales arrachées, têtes fendues en deux, os fracassés, éviscérations, décapitations, hectolitres de sang… Pas de doute, nous sommes bien en présence du nouveau représentant de la célèbre franchise Mortal Kombat : celle-ci n’a rien perdu du gore qui avait fait polémique lors de la sortie de son premier volet en 1992, et qui il faut bien le dire a largement contribué à sa renommée. Ses développeurs ont toutefois compris depuis longtemps que l’ultra-violence seule ne suffirait pas à satisfaire les foules sur la durée, et ils ont su nous proposer depuis le reboot de 2011 des expériences extrêmement complètes, alliant gameplay soigné, contenu étoffé et visuels saisissants. Une approche logiquement conservée pour Mortal Kombat 11 qui donne dans la continuité tout en ne s’interdisant pas certaines innovations remarquées.

Un gameplay familier mais plein de surprises

A première vue pourtant la prise en main est proche du précédent opus, avec des contrôles quasiment identiques : Carré et Triangle pour les coups de poing, Croix et Rond pour les coups de pied, R2 pour bloquer, R1 pour interagir avec l’environnement et amplifier certains coups, L1 pour les projections et L2 pour changer de posture. Ce n’est qu’en vous lançant dans votre premier match que vous remarquerez un changement de taille dans l’interface du jeu, à supposer bien sûr que vous ayez passé quelques heures sur Mortal Kombat X : les jauges d’endurance (stamina) et d’énergie (super) du précédent opus ont en effet disparu, tandis que deux autres dites de vigueur font leur apparition dans le coin inférieur gauche de l’écran (droit pour votre adversaire).

Initialement mises en place pour limiter l’utilisation abusive du dash défensif, de la course, des interactions avec l’environnement, des breakers, des coups spéciaux améliorés et des impressionnantes attaques X-Ray, les jauges d’endurance et d’énergie ont finalement été jugées trop restrictives par les développeurs qui regrettaient de ne les voir qu’en partie exploitées en raison de leur utilisation combinée assez complexe. Selon eux la plupart des joueurs avaient pris l’habitude de n’en profiter que pour les coups améliorés (premier tiers de la barre d’énergie), quelques autres pour les breakers (deuxième tiers), et finalement assez peu pour les attaques X-Ray (troisième tiers).

Afin de permettre à tous de profiter de tous les aspects du gameplay tout en gardant un certain contrôle, il a donc été décidé d’implémenter les jauges de vigueur. Divisées en deux sections et remplies au début de chaque round, elles sont consommées à moitié ou totalement par certaines actions, et se remplissent ensuite automatiquement à un rythme constant. La jauge horizontale dite offensive correspond peu ou prou au premier tiers de l’ancienne barre de super et est notamment consommée par l’amplification de vos attaques, tandis que la verticale dite défensive sert entre autres à échapper aux juggles adverses ou à se relever en effectuant une roulade. Pour la petite histoire sachez que certaines manœuvres peuvent utiliser les deux jauges simultanément, mais il serait trop long de détailler ici tous les cas d’utilisation possibles du nouveau système.

Ce qu’il paraît indispensable de préciser en revanche, c’est que cette modification des jauges s’accompagne de profonds bouleversements dans le gameplay avec en premier lieu la disparition de la course et des breakers tels qu’on les connaissait dans le précédent volet : les développeurs ont non seulement voulu se recentrer sur le corps-à-corps et donc éliminer les ruées permettant de traverser toute l’arène, mais aussi limiter la longueur des combos rendant de fait caduques les anciens breakers (à l’exception de l’échappée des combos aériens mentionnée plus haut). L’apparition d’une garde parfaite au timing serré s’inscrit parfaitement dans cette logique de combat rapproché, et permettra aux plus doués de punir violemment leur adversaire s’ils parviennent à lire correctement son jeu.

Quant aux célèbres X-Ray autrefois disponibles une fois la barre de super pleine, ils sont ici appelés Fatal Blows et ne peuvent être déclenchés que lorsque votre barre de vie descend en-dessous de 30%. Petite subtilité vous ne pourrez y recourir qu’une unique fois par match (pas par round !), et devrez donc bien réfléchir à la pertinence du déclenchement lorsque le round semble mal engagé ou que vous pensez pouvoir le remporter par des attaques classiques. A noter que la manœuvre pourra être contrée par votre adversaire, auquel cas il vous faudra patienter une dizaine de secondes pour retenter votre chance. Dans le même ordre d’idées, sachez que des coups broyants particulièrement puissants peuvent aussi être utilisés une fois par match : si vous réussissez à réunir les conditions requises (punition, amplification…), vous aurez ainsi l’occasion de voir le squelette de votre adversaire se briser en mille morceaux !

S’il faudra évidemment attendre quelques semaines et l’accumulation de centaines de combats avec (et contre) différents personnages pour se forger un avis définitif sur les changements apportés par ce Mortal Kombat 11, force est de reconnaître que nos quelques heures en sa compagnie se sont montrées totalement convaincantes : immédiatement accessible et néanmoins profond pour qui cherche à en maîtriser tous les aspects, le jeu ne pourra en tout cas pas être taxé de suite paresseuse jouant la sécurité.

Un contenu toujours aussi fourni

Et ce n’est pas non plus sur son contenu que la dernière production de NetherRealm pourra être attaquée : comme par le passé le studio nous offre de quoi nous occuper pendant de très longues heures, même si quelques critiques se font déjà entendre ici ou là sur les futurs personnages téléchargeables ou le déblocage laborieux de tous les items cosmétiques du jeu.

Mais commençons par le casting proposé au lancement qui compte tout de même 25 personnages jouables dont 22 anciens de la série et 3 petits nouveaux. On trouve dans la première catégorie Baraka, Cassie Cage, D’Vorah, Erron Black, Frost (à débloquer dans le mode Histoire), Jacqui Briggs, Jade, Jax, Kano, Kitana, Kotal Kahn, Kung Lao, Liu Kang, Johnny Cage, Kabal, Noob Saibot, Raiden, Scorpion, Shao Kahn (bonus de précommande), Skarlet, Sonya Blade et Sub-Zero. La seconde catégorie regroupe la déesse ancienne Cetrion qui peut manipuler la nature, le puissant Geras qui peut contrôler le temps et le sable, et enfin Kollector dont les six bras lui donnent forcément un avantage sur le champ de bataille ! Chacun dispose évidemment d’une panoplie de coups qui lui est propre, et aucun doublon mal déguisé n’est à signaler dans la sélection.

Tous sont logiquement réunis au sein du mode Histoire dans lequel la gardienne du temps Kronika tente de réparer ce qu’elle considère comme les erreurs de Raiden, ce dernier ayant été corrompu par l’amulette de Shinnok récupérée à la fin de Mortal Kombat X. Malheureusement les manipulations temporelles de Kronika engendrent un télescopage des mondes passé et actuel de la série, occasionnant l’arrivée des héros de l’époque qui croisent donc la route de leurs versions plus âgées ! La jeune Sonya découvre ainsi qu’elle aura une fille (Cassie pour les étourdis !) avec l’immature Johnny, tandis que Kung Lao et Liu Kang apprennent leur funeste sort ainsi que le rôle joué par Raiden dans cette tragédie. Bref tous les ressorts habituels du voyage dans le temps sont ici exploités plus ou moins habilement, la narration étant supportée par de nombreuses cinématiques à la mise en scène soignée. Comptez six à huit heures pour boucler les 12 chapitres et 51 combats qui vous attendent, l’affrontement final étant le seul qui nous ait réellement posé problème sur le niveau de difficulté par défaut.

A ce propos, il est sans doute préférable de commencer votre expérience de Mortal Kombat 11 par une visite de sa section Apprentissage dans laquelle vous trouverez un Tutoriel extrêmement complet qui vous enseignera les bases du combat, les attaques et défenses avancées, le principe des frames d’animation et la construction de combos. Il vous donnera en outre de précieuses informations sur les avantages, la pression et le positionnement, et vous proposera de petits exercices pour prendre en main chacun des personnages. Vous pourrez ensuite passer à un entraînement plus poussé contre l’IA, ou vous exercer aux mythiques Fatalities.

Une fois bien assimilés les différents aspects du jeu, il sera temps de débloquer les épilogues des combattants en se lançant dans les Tours Klassiques, puis de tenter des défis un peu plus corsés dans les Tours du Temps. Evidemment vous pourrez aussi affronter un ami en match simple ou en tournoi, et vous mesurer à la terre entière dans le mode En Ligne qui propose différents modes de jeu, classés ou non, dont les classiques Versus et Roi de la Colline. A noter la reconduction des Kombats IA qui vous permettent de créer vos équipes de défenseurs et d’attaquants (trois personnages pour chacune) qui affronteront celles d’autres joueurs en ligne de façon automatisée.

Une customisation poussée à l’extrême

Sachez par ailleurs que le système des variantes inauguré dans le précédent volet fait son grand retour dans une version beaucoup plus poussée : chaque personnage dispose ici de deux variantes de base, mais vous pouvez désormais les modifier et même en créer de nouvelles vous-même. Vous choisissez alors non seulement l’équipement, la skin, les cinématiques d’introduction et de victoire, ou encore les Fatalities et les Brutalities, mais aussi les capacités qui ajouteront de nouveaux coups spéciaux à la panoplie de votre combattant. Plusieurs presets de capacités sont inclus pour chaque personnage, deux d’entre eux seulement étant autorisés pour les tournois officiels. Dans la même veine vos équipements gagneront de l’XP lorsque vous les utiliserez, ce qui débloquera jusqu’à trois emplacements de bonus permettant d’améliorer vos statistiques de base : un mécanisme réservé au jeu solo et complètement désactivé en mode compétitif.

Si vous récupèrerez déjà quelques items de customisation en vous lançant dans les modes de jeu mentionnés plus haut, ce n’est qu’en explorant la nouvelle Krypte du jeu que vous enrichirez de manière significative votre collection. Située sur l’île de Shang Tsung, elle renferme des dizaines de coffres et autres lampes magiques à déverrouiller avec l’une des monnaies du jeu (les Koins, les Fragments d’âme et les Cœurs), elles aussi amassées en enchaînant les matchs. Histoire de pimenter un peu les choses la Krypte se présente sous la forme d’un jeu d’action/aventure à la troisième personne, qui nécessitera pas mal d’exploration, l’obtention d’objets clés et la résolution de mini-puzzles pour accéder à toutes ses zones. Elle inclut en outre une Forge qui vous permettra de combiner trois objets pour obtenir un item rare, ainsi que de nombreux autres secrets.

Sachant que chaque personnage compte au total 30 versions de chacune de ses 3 pièces d’équipement, 60 skins, 4 cinématiques d’introduction, 4 ou 5 cinématiques de victoires, 2 Fatalities et plusieurs Brutalities et Provocations, vous comprendrez qu’il sera vraisemblablement difficile de débloquer tout le contenu du jeu avant la sortie de son inévitable suite, probablement dans quatre ans ! Les plus pressés pourront toujours faire un tour dans sa boutique Premium qui utilise une monnaie baptisée Kristaux de Temps, dont certains seront récupérés en jouant mais qui peuvent aussi être achetés avec de vrais euros.

Une technique irréprochable

A ce stade, vous ne serez sans doute pas surpris d’apprendre que Mortal Kombat 11 offre un spectacle à la hauteur de son contenu et de son gameplay. Pourtant basé sur le vénérable Unreal Engine 3 dont le successeur sévit depuis près de cinq ans déjà sur nos machines, il nous en met régulièrement plein les yeux avec ses Fatal Blows tous plus impressionnants les uns que les autres, mais aussi grâce à une modélisation soignée des ses combattants et de sa vingtaine d’arènes. Que vous vous battiez dans le désert, dans un bunker, sur un bateau naviguant sur une mer de sang ou dans le repaire de Goro, les arrière-plans fourmillent de détails et de vie tandis que les combattants s’étripent sur le devant de la scène. Evidemment les gerbes de sang fusent dans tous les sens et les démembrements succèdent aux enfoncements de cages thoraciques, ce qui une fois de plus risque de choquer un public non averti : on l’espère de plus en plus restreint alors que la franchise approche les 30 ans !

Côté audio vous aurez droit à des musiques étonnamment discrètes et des doublages en français corrects avec toutefois quelques ratés de synchronisation sur quelques cinématiques du mode Histoire, tandis que les combats seront rythmés par les craquements d’os et les bruits de chair découpée, écrasée et brûlée de mille et une manières. Du Mortal Kombat comme on l’aime en somme.